Service peu connu du grand public, l’Accueil de jour gériatrique du centre hospitalier de Douarnenez existe depuis plus de dix ans. Y sont reçues, chaque semaine, des personnes âgées souffrant de la maladie d'Alzheimer ou de maladies apparentées. L’accueil de jour propose un accompagnement individualisé aux personnes accueillies, visant à maintenir leur autonomie, et un soutien à leurs aidants en leur libérant du temps et en leur donnant la possibilité d’échanger avec des professionnels et d’autres familles.

Ainsi, du lundi ou vendredi, des groupes de personnes de plus de 60 ans sont reçus dès le matin, où ils s’adonnent à diverses activités cognitives (qui font appel à des connaissances, impliquent le langage, la mémoire, le raisonnement, etc.), comme des jeux de réflexion ou de stimulation de la mémoire, de la cuisine ou du chant. L’après-midi est consacrée à des activités physiques et manuelles, comme du jardinage ou de la gymnastique douce. De cette façon, elles entretiennent leurs capacités grâce à diverses activités ciblées, renouent du lien et restent en contact avec leur environnement, avec le monde, en sortant de chez elles régulièrement.

L’école de l’autonomie

Derrière les grilles de l'ancienne école maternelle Jean-Turmeau, située rue des Plomarc'h, au cœur de la ville, règne un calme apaisant. Dans la petite cour décorée et fleurie avec goût, les rires de bambins jouant au ballon ou à la corde à sauter ont cédé leur place au chant des oiseaux. Des élèves demandant tout autant d'attention et aimant eux aussi apprendre, rire et jouer, sont réunis dans la pièce de vie jouxtant la cour.

Une différence, tout de même : ils ont en moyenne 80 ans et en ont vu, des crises et des révolutions ! Leurs histoires laisseraient cois ceux qui n’imaginent déjà pas un monde sans smartphones ni Instagram. Quels que soient leurs troubles, ils inspirent au personnel de santé qui les accueille un respect qui n’est pas feint. Pas question de les infantiliser. Les activités qui leur sont proposées sont conçues pour stabiliser, voire ralentir, leurs troubles cognitifs, mais aussi pour susciter leur intérêt, les divertir et valoriser leurs compétences.

participants

« Il ne faut pas faire pour faire. Il faut qu’il y ait un sens dans tout ce qu’on leur propose, insiste Agnès Canevet, infirmière coordinatrice à l’Accueil de jour. Les travaux pratiques, par exemple, font rejaillir des souvenirs de l’époque où ils travaillaient, leur rappellent des réflexes professionnels, des gestes qu’ils avaient l’habitude de faire. »

Aujourd’hui, sept personnes échangent avec enthousiasme autour de la grande table de la pièce de vie. Des biscuits cuisent au four et du jus d'orange frais est tout disposé à étancher les soifs. Le journal du jour, détaillé par Manon Lejeune, aide-soignante et toute jeune recrue, est au cœur des attentions et des échanges. Pour les animatrices, il est essentiel d'ancrer les participants dans la réalité, de les rattacher au monde qui les entoure et à l’actualité, de ne surtout pas les enfermer dans un passé qui, parfois, leur glisse entre les doigts. Tous souffrent de troubles cognitifs qui affectent la mémoire, à différents degrés, mais vivent encore à leurs domiciles. Le but : faire en sorte qu’ils puissent, le plus longtemps possible, conserver cette autonomie.

Plus forts ensemble

« L’Accueil de jour a trouvé sa place dans une ancienne école. Pour autant, on n’est surtout pas là pour jouer les instituteurs ! Et eux ne sont pas là pour avoir de bonnes notes, être premiers de la classe, précise Agnès Canevet. Au contraire, chacun aide l’autre. Ils échangent beaucoup entre eux et c’est très constructif. »

Les créations des participants, exposées dans l'ensemble de l'Accueil de jour (composée d'une pièce de vie, d'une salle de télévision, d'un espace de repos et d'une cuisine), en sont la meilleure preuve. Origami, dessins, sculptures, collages, etc. : avec peu de moyens mais un sens certain de la récup', l'équipe de l'Accueil de jour fait en sorte de les initier à un maximum de techniques, et le résultat est là. L'année dernière, l'Accueil de jour a d'ailleurs remporté le concours de cartes de voeux lancé par le Centre hospitalier de Douarnenez.

carte de voeux

Les personnes reçues à l’Accueil de jour apprécient tout particulièrement cette opportunité de créer du lien, d’échanger avec des personnes différentes, aux parcours très distincts. Leurs troubles ne condamnent ni leurs facultés intellectuelles, ni leur créativité, ni leur curiosité. Ils sont même avides de nouvelles rencontres, heureux lorsqu’ils « reçoivent des invités » à l’Accueil de jour. Dans ces contextes, ils s’activent ensemble à préparer le repas ou le goûter, à dresser une jolie table, etc. L’Accueil de jour invite donc un maximum d’intervenants extérieurs à venir passer un moment avec les participants, que ce soit pour leur proposer une activité, une animation, ou encore un récit de voyage accompagné d’un visionnage de photos. Ces rencontres permettent aux participants de se sentir utiles, mais aussi de créer du lien, d’apprendre de l’autre, d’aborder ensemble un monde en constante évolution.

Plus les animations et rencontres sont variées, mieux les participants se portent ! La petite équipe gérant l’Accueil de jour (Agnès Canevet et Manon Lejeune, mentionnées plus tôt, mais aussi Jacky Riou, aide soignante, et Solène Humeau, psychologue), si elle accomplit un travail colossal, n’en apprécie pas moins vivement les soutiens bénévoles.

Toute personne ayant une activité à proposer (particulièrement des activités pour les hommes : bricolage, etc.), une animation à offrir ou un récit à partager serait accueillie à bras ouverts par l’équipe de l’Accueil de jour.

Crêpe party, en breton, ça veut dire merci

L’Accueil de jour sait d’ailleurs remercier ses différents soutiens, qu’ils soient soignants, partenaires ou même commerçants du coin… Ainsi, des repas crêpes sont organisés depuis mars dernier par l’équipe, et ce afin d’inviter tous ceux qui participent à faire vivre et évoluer l’Accueil de jour, à un moment de partage dans un cadre détendu. C’est une crêpière bénévole qui met la main à la pâte, à chacun de ces rendez-vous. Là encore, toute personne ayant envie de soutenir le travail de l’Accueil de jour et disposée à faire profiter de ses talents en cuisine serait bienvenue, afin d’épauler ou relayer cette précieuse crêpière !

crêpes

Une décision concertée  

L’entrée à l'Accueil de jour est décidée à la suite d’une consultation à l’hôpital de jour ou à la demande spontanée des aidants, pour qu’ils s’accordent un temps pour souffler ou accomplir des démarches qu'ils ne peuvent mener lorsqu'ils s'occupent de leur proche.  Ils savent qu’ici, leur mère, père ou époux est entre de bonnes mains.

Avant leur intégration à l’Accueil de jour, les futurs participants sont évalués, afin de déterminer leur degré de perte d’autonomie (GIR). L'évaluation du GIR permet de savoir si une personne âgée peut bénéficier de l’APA (allocation personnalisée d’autonomie). Cette aide allège le coût des séjours en Accueil de jour (participation aux frais de repas, de déplacement – déduits si l’aidant accompagne lui-même son proche -, etc.), pris en charge en grande partie par l’ARS.

L’Accueil de jour est situé juste à côté de la plateforme de répit, et les deux structures sont complémentaires et mises en lien par Aurélie Abguillerm, cadre de santé (en photo ci-dessous, avec Agnès Canevet, infirmière coordinatrice de l'Accueil de jour) résolument passionnée par sa mission au sein de la plateforme de répit.

agnès et aurélie

Cette dernière insiste, cependant : « Oui, l’Accueil de jour est le relais des aidants, mais pas seulement. Tandis que les aidants peuvent conserver une certaine indépendance, prendre du temps pour eux, leurs proches trouvent à l’Accueil de jour un second foyer et des occupations aussi appréciées que bénéfiques, mais aussi ludiques ». L’anxiété va souvent de pair avec les troubles cognitifs, et l’humour et le jeu constituent d’excellents biais pour détourner les angoisses des participants. Apaiser les aidants autant que les aidés, c’est la mission de l’Accueil de jour et, depuis dix ans, à Douarnenez, elle est relevée.